L'Atrésie de l'Oesophage de Emile...
l'AO au jour le jour...

et pour quelques années...


15 novembre 2006
 
Comme Emile a une atrésie de l'oesophage type 1, nous avons eu la chance de bénéficier d'une détection de la malformation "in utero", dans mon ventre. Elle a eu lieu lors de la 3ème échographie. A la deuxième, l'estomac du bébé était "plat", mais comme cela peut arriver que l'estomac soit vide juste au moment de l'échographie, l'échographe ne s'est pas alarmée.... A la 3ème échographie, toujours "estomac plat".... L'échographe trouve ça bizarre et pousse l'échographie un peu plus loin. Elle ne dit plus rien, ne fait plus de commentaire... Je me rends compte tout de suite que quelque chose cloche... Rapidement, elle brise le silence et nous dit: "votre enfant a une atrésie de l'oesophage, mais ce n'est qu'une suspicion pour le moment". elle ajoute: "ça s'opère très bien de nos jours. C'est un petit problème pas grave, ce n'est rien, ne vous inquiétez pas"...  
 
Et nous voilà dehors, avec le profil de notre bébé en photo qui a .... ce ... "petit problème pas grave"...  
 
Nous rentrons à la maison en vitesse et fonçons sur internet. "atrésie de l'oesophage", quezako que ça?  
 
Nous tombons de suite sur le site de l'AFAO et nous apprenons que l'atrésie de l'oesophage n'est pas du tout "un p'tit problème pas grave"....  Je suis effondrée en lisant notamment la liste des syndromes VATER, c'est à dire des malformations associées à l'atrésie de l'oesophage: la trisomie, des malformations des vertèbres, reins, anus, membres, coeur...  sans compter des suites opératoires lourdes et de la vie de nos enfants atrésiques les 5 premières années....  
 
Sylvain est, malgré tout, assez confiant et m'incite à éteindre internet. j'envoie malgré tout un email de demande d'informations à l'Afao, l'association française de l'atrésie de l'oesophage. 
 
La nuit se passe. Le lendemain, je contacte ma maternité et le médecin qui s'occupe de mon cas, le Dr  Zabak. Il me prend le jour même en rendez -vous et me parle immédiatement de trisomie. c'est la 2ème fois que j'entends parler de trisomie comme syndrome lié à l'atrésie. Mais il  m'oriente vers le pédiatre de la maternité et nous prenons rendez vous pour 2 jours plus tard.  En attendant le rendez -vous, nous lisons beaucoup d'avis contradictoires concernant la trisomie en malformation associée... Nous fondons de grands espoirs sur ce rendez -vous pour enfin nous éclairer sur "la vérité de l'atrésie de l'oesophage" et notamment sur la trisomie.  Cela fait 2 jours que nous sommes ballotés d'avis contradictoires en informations diverses, 2 jours que nous lisons sur internet des histoires très dures de bébés atteints d'atrésie de l'oesophage ayant subi des hospitalisation très longues (3 mois- 9 mois- 1 an)... et d'autres ressortis de l'hôpital 3 semaines après leur opération..... 
Bref, ce rendez -vous est capital pour nous. Nous comptons dessus pour être enfin fixés. Je suis tout de même à 7 mois 1/2 de grossesse et envisager une amniocentèse et peut -être un résultat positif, donc envisager ou non une interruption de grossesse ... à 7 mois 1/2! me détruit. 
 
Sylvain prend un jour de congé pour être présent. Ma soeur prend notre fils ainé chez elle.  
 
Le pédiatre nous explique... le pourquoi inconnu, le comment  éventuel après la naissance... et nous affirme qu'il n'y a  pas plus de risque de trisomie chez les enfants atteints de l'atrésie de l'oesophage que chez les autres. J'ai du mal à le croire. Il parle de la chirurgie de l'atrésie de l'oesophage comme celle d'une simple appendicite... mais... dans le marasme dans lequel nous sommes, c'est une bonne nouvelle que nous accueillons malgré tout. 
 
Le pédiatre nous informe qu'il faut nous attendre à une hospitalisation en soins intensifs de plusieurs semaines et ce… dès la naissance. Et qu'il est impossible de connaitre les autres malformations associées avant la naissance...  
 
A notre retour à la maison, nous téléphonons à nos proches et à nos amis pour leur annoncer la bonne nouvelle. tout le monde est soulagé... sauf moi qui ai trouvé l'intervention du pédiatre un peu légère... je ressors de ce rendez-vous encore plus destabilisée qu' avant... un premier avis nous dit que oui, il y a un risque de trisomie, lui nous dit que non.... bref... il nous faut un 3ème avis, c'est impératif!! Quelle galère... ça fait 3 jours que nous nageons en eau trouble.... mais où trouver les informations exactes?  
 
 
Je post un premier message à un forum sur www.infobebes.com qui a un sujet "atresie de l'oesophage". Je rencontre plusieurs mamans de bébés atrésiques. c'est le début d'une longue connivence avec elles qui dure encore aujourd'hui, plus de 1 an après. c'est une grande aide pour moi, je ne connais pas meilleur moyen pour surmonter le quotidien à la maison avec nos enfants malades. 
 
Pendant ce temps, le contact parisien de l'AFAO m'a répondu et m'a même téléphoné! il s'agit de Viviane, la présidente de l'association. Elle me confirme ce que je craignais: la trisomie est bien présente dans les syndromes VATER... il va falloir faire une amniocentèse. Mon monde s'écroule de nouveau. Nous discutons longtemps, notamment de "où" aller pour être le mieux opéré. Nous avons la chance d'habiter Paris 14eme, et l'hôpital des enfants malades Necker est dans le 15ème. Elle me conseille Le Prf Sarnacki, qui a déjà fait des interventions avec l'association. Elle me parle aussi des autres malformations associées qui représentent une minorité de cas, qui sont aussi des malformations génétiques, malformations motrices, mentales, nerveuses, osseuses. Certes, dans la majorité des cas d'atrésie, l'atrésie est isolée et la chirurgie est, de nos jours, au point sur cette pathologie. Mais quels que soit le cas de gravité de l'atrésie, il y a des effets secondaires parfois non négligeables comme plusieurs opérations à répétitions, des difficultés à avaler jusqu'à l'âge adulte ou des fragilités pulmonaires importantes les premières années de vie de l'enfant . 
 
Concernant la trisomie, quand on a "la chance", comme nous, d'avoir eu un diagnostic anténatal (la majorité des cas d'atrésie se détecte à la naissance), il est important de ne pas prendre ce faible risque à la légère, même si les résultats prise de sang "Trisomie" sont bons. 
 
Pour cela, il faut être suivi par un chirurgien en "chirurgie viscérale pédiatrique" qui devrait vous orienter vers un échographe "spécialisé" dans ce genre de dépistage. (car on ne trouve que ce que l'on cherche. si on ne sait pas quoi chercher, on ne trouve pas). puis, accoucher dans l'hôpital ou le bébé va être opéré.  
 
Même si les risques d'autres malformations sont faibles, il est important d'essayer tout de même de les dépister. car si elles sont là, il faut se préparer soit au pire (IMG), soit à l'arrivée du bébé dans un contexte particulier (assistante sociale, associations etc....). 
 
Viviane m'a bien aidée et bien orientée. Merci mille fois Viviane! 
 
Voilà, cela fait une semaine que le couperet est tombé et enfin! enfin! j'ai l'impression d'être enfin sur de bons rails! je viens de changer de maternité et suis suivie à Necker, qui est l'hôpital parisien de référence en ce qui concerne les problèmes de maladies génétiques. Je passe une échographie dans la semaine, ai rdv avec le Prf. Sarnaki lundi 4 déc et après, on verra ce que donnent les résultats.  je fais part des derniers évènements au médecins de ma maternité le Dr Zabak. Je lui dis qu'il  me semble absolument anormal que son collègue pédiatre nous ait fourni des fausses informations... que je suis étonnée d'une telle désinformation pour une maternité qui pourtant a excellente réputation... que je change de maternité.  
 
Tout au long des 6 mois suivant, le Dr Zabak prendra de nos nouvelles par email. Il transmet mes remarques à son collègue pédiatre qui m'appellera  quelques jours plus tard pour s'excuser... et se réjouir que nous ayons finalement atterri à Necker et trouvé l'information nécessaire… sans son aide malgré tout! 
 
Pendant 5 jours, nous avons lancé des bouteilles à la mer, nous sommes allés à la pêche à l'information... les informations s'accumulent... nous nous préparons à affronter la suite. Mais  nous sommes enfin dans le bon circuit pour être "suivis" comme il le faut. Je suis convaincue que nous avons choisi les meilleurs chirurgiens. Le bébé peut voir le jour... nous sommes prêts à affronter la maladie... du moins nous l'espérons. 
 
avant la naissance, nous avons encore quelques étapes à franchir. le terme "officiel" de la naissance est le 23 janvier 07. nous sommes le 2 décembre au terme  de nos investigations... encore plus de 2 mois à tenir!  
 
Etant classée comme "grossesse à risque", je passe ma vie à Necker et dans les cabines d'échographie afin d'effectuer de multiples examens. le but étant d'essayer de détecter avant la naissance les éventuelles malformations. Je passe donc une échographie cardiaque du foetus pour voir les malformations cardiaques éventuelles, un IRM  foetal afin d'essayer de voir la taille de l'écart entre les deux culs de sac. On me fait des injections de corticoïdes pour maturer les poumons du bébé.  
 
4 décembre 2006
 
Nous rencontrons la chirurgienne de Necker qui va opérer le bébé: Mme Sarnacki. Nous avons un bon contact avec elle. Elle nous explique que on est parti pour entre 2 et 4 mois d'hospitalisation minimum au lendemain de la naissance. Elle nous conseille fortement de faire une amniocentèse, étant donné que  5 à 15% des atrésiques sont atteints de la trisomie 21. Je me décide donc une bonne fois pour toutes 
pour faire l'amniocentèse…. Sylvain ne voulait pas faire l'amniocentèse, mais conscient de sa position d'homme dans cette histoire, il m'a laissé le choix de l'acte. De mon côté, j'avais besoin de savoir à l'avance si notre bébé serait trisomique ou non. Si  c'est le cas, j'aurais voulu me rapprocher d'associations avant la naissance afin de ne pas me retrouver au dépourvu à la naissance. Je décide donc de faire une amniocentèse. Le risque de provoquer le naissance est faible et même si cela  arrivait, je suis à 30 semaines de grossesse et notre bébé ne serait plus un prématuré. L'amniocentèse a donc lieu. Nous aurons les résultats en moins d'une semaine vu la situation d'urgence.  
 
Mon ventre me fait horriblement mal et est extrêmement tendu. j'ai beaucoup de mal à marcher, c'est une véritable douleur de rester debout et je dors très mal. C'est une des conséquences de l'atrésie. En effet, une femme enceinte produit chaque jour du liquide amniotique. Chez un enfant en bonne santé, ce liquide est avalé par l'enfant, passe dans l'estomac  et, est recyclé par la mère. Dans notre cas, comme le bébé ne peut pas "manger"... il n'avale pas le liquide.... mais moi, je continue de le produire... et je le stocke! C'est ce qu'on appelle un "hydramnios": excès de liquide amniotique. je passe en tout 2 "pompages" de liquide amniotique où on me retire 2 litres de liquide à chaque fois! A chaque vidange, je sens mon ventre se dégonfler et je "souffle" pendant  2-3 jours avant que ça redevienne difficile.  A ma première vidange, je perds  6 cm de tour de ventre et  2 kgs! 
 
Je passe ma vie dans les hôpitaux et je compte les jours. Chaque soir, je me dis "un jour de plus de passé". Notre fils ainé passe pas mal de temps chez ma soeur afin de me permettre d'aller à mes millions de rendez-vous médicaux et pour me permettre de me reposer au maximum. A chaque minute qui passe, il faut que je chasse de mon esprit la catastrophe d'un résultat positif de la trisomie. Dans ces conditions, il m'est difficile de garder le moral. Je me sens si fatiguée et tellement vulnérable. 
 
Nous rencontrons la chirurgienne de Necker qui va opérer le bébé: Mme Sarnacki. Nous avons un bon contact avec elle. Elle nous explique que on est parti pour entre 2 et 4 mois d'hospitalisation minimum au lendemain de la naissance. Elle nous conseille fortement de faire une amniocentèse, étant donné que  5 à 15% des atrésiques sont atteints de la trisomie 21. Je me décide donc une bonne fois pour toutes 
pour faire l'amniocentèse…. Sylvain ne voulait pas faire l'amniocentèse, mais conscient de sa position d'homme dans cette histoire, il m'a laissé le choix de l'acte. De mon côté, j'avais besoin de savoir à l'avance si notre bébé serait trisomique ou non. Si  c'est le cas, j'aurais voulu me rapprocher d'associations avant la naissance afin de ne pas me retrouver au dépourvu à la naissance. Je décide donc de faire une amniocentèse. Le risque de provoquer le naissance est faible et même si cela  arrivait, je suis à 30 semaines de grossesse et notre bébé ne serait plus un prématuré. L'amniocentèse a donc lieu. Nous aurons les résultats en moins d'une semaine vu la situation d'urgence.  
 
Mon ventre me fait horriblement mal et est extrêmement tendu. j'ai beaucoup de mal à marcher, c'est une véritable douleur de rester debout et je dors très mal. C'est une des conséquences de l'atrésie. En effet, une femme enceinte produit chaque jour du liquide amniotique. Chez un enfant en bonne santé, ce liquide est avalé par l'enfant, passe dans l'estomac  et, est recyclé par la mère. Dans notre cas, comme le bébé ne peut pas "manger"... il n'avale pas le liquide.... mais moi, je continue de le produire... et je le stocke! C'est ce qu'on appelle un "hydramnios": excès de liquide amniotique. je passe en tout 2 "pompages" de liquide amniotique où on me retire 2 litres de liquide à chaque fois! A chaque vidange, je sens mon ventre se dégonfler et je "souffle" pendant  2-3 jours avant que ça redevienne difficile.  A ma première vidange, je perds  6 cm de tour de ventre et  2 kgs! 
 
Je passe ma vie dans les hôpitaux et je compte les jours. Chaque soir, je me dis "un jour de plus de passé". Notre fils ainé passe pas mal de temps chez ma soeur afin de me permettre d'aller à mes millions de rendez-vous médicaux et pour me permettre de me reposer au maximum. A chaque minute qui passe, il faut que je chasse de mon esprit la catastrophe d'un résultat positif de la trisomie. Dans ces conditions, il m'est difficile de garder le moral. Je me sens si fatiguée et tellement vulnérable. 
 
Le 20 décembre, nous avons la réponse de la trisomie. Il est "normal en nombre". Le bébé n'est pas trisomique... 
 
Je passe une seconde vidange le 21 décembre. J'ai produit en 1 semaine ce que j'avais produit avant en 2 semaines. je suis à 380  (au lieu de 160 pour une grossesse classique au même terme)... Je n'en peux plus. La vidange me soulage quand même un peu mais je commence à véritablement ne plus supporter l'attente et les allers et venues… Mon corps n'est que douleur et l'avenir tellement noir. 
 
Nous passons un Noël tranquille à la maison. L'attente devient longue et l'inconnu de "après" la naissance se fait pesante. La fatigue due à l'hydramnios est là et bien là. et pourtant, ce n'est qu'un début.  
 
Nous avons été obligés de "masquer" la vérité et de dédramatiser la situation pour les parents de Sylvain. Ils n'ont jamais été au courant du risque de trisomie et nous ne leurs avons pas raconté tout ce que nous savions sur les autres malformations associées. Ils sont âgés et tout savoir les aurait tués. Rien que l'annonce de la malformation les a effondrés et nous passons du temps pour les rassurer. C'est dur aussi pour moi... car c'est difficile de devoir "s'occuper des autres" alors que ... plus que jamais... c'est à toi que tu devrais penser. 
 
Je passe une seconde vidange le 21 décembre. J'ai produit en 1 semaine ce que j'avais produit avant en 2 semaines. je suis à 380  (au lieu de 160 pour une grossesse classique au même terme)... Je n'en peux plus. La vidange me soulage quand même un peu mais je commence à véritablement ne plus supporter l'attente et les allers et venues… Mon corps n'est que douleur et l'avenir tellement noir. 
 
Nous passons un Noël tranquille à la maison. L'attente devient longue et l'inconnu de "après" la naissance se fait pesante. La fatigue due à l'hydramnios est là et bien là. et pourtant, ce n'est qu'un début.  
 
Nous avons été obligés de "masquer" la vérité et de dédramatiser la situation pour les parents de Sylvain. Ils n'ont jamais été au courant du risque de trisomie et nous ne leurs avons pas raconté tout ce que nous savions sur les autres malformations associées. Ils sont âgés et tout savoir les aurait tués. Rien que l'annonce de la malformation les a effondrés et nous passons du temps pour les rassurer. C'est dur aussi pour moi... car c'est difficile de devoir "s'occuper des autres" alors que ... plus que jamais... c'est à toi que tu devrais penser. 
 
Le 28 décembre, j'ai rendez vous à Necker pour vérifier le taux d'hydramnios. Mon ventre est tellement tendu qu'il pourrait exploser et je ne peux quasiment plus marcher. J'en peux plus, je suis en "bout de course".  Mon taux  de liquide amniotique est très élevé et l'échographe  hésite à me faire une 3ème vidange. Nous sommes à 28 semaines de grossesse. Il me demande "comment ça va"... je lui réponds "je n'en peux plus, je suis en fin de course" . Alors, vu ma tête, il me propose de déclencher la naissance aujourd'hui. L'annonce me surprend, je n'y avais pas pensé.... mais je suis tellement fatiguée que j'accepte.   
 
Malheureusement, au même moment, c'est l'affluence dans les couloirs de la maternité, beaucoup de me mamans arrivent pour accoucher. On me dit "ce n'est pas grave, revenez dans 4 jours!". Il est hors de question pour moi de rester encore 4 jours dans cet état. Je ne lâche pas prise et demande que on me fasse au moins un 3eme vidange pour me permettre de tenir encore 4 jours! Chaque mouvement est une douleur. Je suis extrêmement fatiguée sans parler de l'angoisse que j'ai du mal à gérer. Le médecin s'en va et revient en nous disant "rendez -vous demain pour le déclenchement. On a vérifié que l’anesthésie et la chirurgie afin qu'ils soient libres pour prendre en charge votre bébé tout de suite après la naissance »…  
 
Nous repartons donc chez nous...je suis à demi soulagée tellement je suis douloureuse. Nous n'avons que 20 minutes de bus pour rentrer à la maison mais pourtant, ça me semble infaisable. J'ai envie de pleurer.  En plus, je me traite une bronchite depuis 3 bonnes semaines qui finit de m'achever...  Notre bébé naitra donc demain le 29 décembre 2006. et après... "nos vies sont dans les mains de Dieu" comme on dit en Arabe... 
 
Me voici le 28 décembre 2006:(le sourire est de façade, je suis très inquiète et déjà très très fatiguée...). je n'ai pris que 7 kg pendant la grossesse.



Le 29 déc arrive enfin….. Déclenchement par synthosinon en intraveineuse. On commence à 9h du matin… les contractions sont là sur le monitoring, je ne les sens presque pas. On patiente…..  
 
A 11h, j’ai un peu de fièvre à cause de la bronchite. Ils décident de me mettre sous antibiotiques et de me faire la péridurale dans la foulée….. archi cool… 
 
A midi, les contractions sont anarchiques, 3-4 par 10 minutes mais pas très grosses…. Le col ne bouge tire pas : mi-long ouvert à 3…. Rien ne se passe…… je suis shootée, je plane et Sylvain mon époux va manger…. 
 
A 15h…. re-cheking du col… tjr aucune modification et des contractions qui viennent et repartent sans régularité….. Topo est fait : échec du déclenchement !!! je me renseigne auprès des sages femmes « et donc ? Qu’est ce qu’on fait si ça ne marche pas ? »… elle me répond « dans ce cas là, comme il faut bien qu’il naisse ce bébé, on fait une césarienne »…..ah ! Voilà une situation que je n’ai jamais envisagée…. Ça me fout la trouille. La sage femme doit s’en rendre compte puisqu’elle me dit « écoutez, on essaye encore pdt 1h, pdt ce temps, parlez à votre bébé, ça peut marcher »….. Pendant une heure, on lui parle, Sylvain et moi…. Mais rien ne se passe….. Force est de constater à 16h que la situation n’a absolument pas changé……le diagnostic est posé : échec du déclenchement : césarienne. 
Je suis emmenée vite, très vite, trop vite. J’ai à peine le temps de serrer la main de mon chéri et je suis seule face à la naissance de ce bébé… 
 
Arrivée dans la salle d’opération, je me mets à pleurer, j’ai peur. Sylvain n’est pas là. Je ne me suis pas préparée à cette situation…. Je subis. 
 
16h19 : C'est un garçon qui  sort de mon ventre! il s'appellera Emile, comme mon grand -père.  J’ai senti toutes les aspirations du liquide amniotique, sans douleur, mais j’ai senti qu’on trifouillait là dedans. Les anesthésistes m’ont parlé pendant toute l’opération, m’ont raconté ce que faisaient les chirurgiens… alors, ça m’a calmée un peu. 
 
Emile s'en va vers son papa et direct en réanimation:


le tuyau jaune est l'alimentation entérale. Quand les enfants  rentrent à la maison avec une alimentation antérale, on leur met à la place du tuyau jaune un "bouton mickey"... c'est à direune petite entrée avec valve de fermeture et d'ouverture. 


 On distingue bien sur cette photo la replog, cette sonde qui aspire la salive. puis les scops.

Emile a quelques minutes de vie sur cette photo :

Voici le berceau d' Emile en réanimation: 

En salle de réveil, je discute avec une infirmière qui me dit que les bébés sont des êtres très forts . Sylvain me rejoint et me montre des photos de notre bébé que je n'ai vu que quelques secondes à la naissance. 
 
Je rentre dans ma chambre de maternité. Je suis toute seule, Sylvain est avec Emile, mais je suis soulagée de l’être tellement la césarienne me fait mal…. La bronchite est tjrs là et tousser me déchire de l’intérieur. Je quémande pendant 2 jours aux infirmières de faire quelque chose….j‘ai tellement mal. Il a fallu attendre que je fonde en larme le 3ème jour pour qu’ils fassent venir un kiné qui va m’aider à expectorer la bronchite et pour qu’ils augmentent les doses d’anti douleur. Ma tension est très basse (j’ai fait un pic à 6 pendant le déclenchement et je vole à 7.5-8.5 pendant tout mon séjour à la mater). Malgré ma petite tension, la sage femme me balance le 2ème jour « faut vous lever madame, votre bébé a besoin de vous ! »…… ça m’effondre…. Je me sens tellement faible et en plus, elle me culpabilise ! J’ai pas réagi qd elle me dit ça…. J’aurais dû l’envoyer sur les roses…… 
 
Je suis très déçue par la maternité de Necker. C’est un hôpital reconnu à la pointe pour la chirurgie néonatale et enfantine, mais question maternité ;… c’est la cata ! Personnel pas prévoyant, pas sympa, pas présent….. 
 
Du coup, je demande une chaise porteuse pour aller voir mon bébé en réanimation…. Une fois dans la chambre d' Emile, je m’évanouis 3 fois de suite… les infirmières sont hallucinées de voir que l'on m'ait laissée sortir de ma chambre de maternité dans un tel état.  Je rentre allongée sur un brancard… épuisée…. 
 
Le lendemain…. Une autre sage femme me fait le même coup ! Mais là je ne craque pas et ne me laisse pas culpabiliser….. je dis « oui oui »…. Mais n’en pense pas moins….. le 4ème jour, je demande à prendre ma tension (j’ai 8.5) et je me fais accompagner à la réanimation pour voir Emile. Je me sens encore faible. Je ne peux pas rester longtemps. 
Le 5ème jour, j’ai hâte de sortir de cette maternité où je ne me sens pas du tout accompagnée.. ; j’ai tjrs très très mal à la cicatrice…. Je marche un peu mais ça me déchire de l’intérieur…. Je regrette cette césarienne que je n’ai pas choisie….. déjà que mon bébé va être séparé de moi pendant des semaines, ne pas avoir l‘impression de lui avoir donné naissance finit de m’achever. Je sors le matin du 5ème jour…. J’ai tjrs très mal…. 
 
Sylvain s’occupe de tout à la maison, notre 1er fils et tout le reste. Il a l’air d’aller bien. Moi, je suis effondrée au fond de mon lit.  
 
Le lendemain, soit le 6ème jour, je vais voir mon généraliste pour qu’il me dope. J’ai besoin de vitamine, de diantalvic pour la douleur, de me remettre tellement je me sens mal…. J’ai mal à la tête pendant 4 jours  sans interruption…. 
 
Sylvain va voir Emile 2 fois par jour… ; et moi, je ne me sens même pas capable de sortir de chez moi tellement j’ai mal….. 
 
Les jours passent pas drôles, moroses. Sylvain ne comprend pas pourquoi je ne vais pas voir Emile, il me dit que « je ne suis pas rigolote en ce moment » en espérant me faire réagir. il croit que je suis en train de tomber dans la dépression… 
 
10 jours après la naissance,  la césarienne me fait toujours horriblement mal. Ma sœur est rentrée de vacances, Sylvain a repris le travail et ma sœur a pris Félix pour la semaine chez elle…… toute cette semaine est entièrement à moi pour me reposer et j’ai décidé d’aller voir Emile tous les après midi. J’irai en taxi car j’ai tjrs énormément de mal à marcher. En passant, je vais aux urgences de la maternité pour vérifier la césarienne. 
Tenir 2 mois va être long…. Je prends aujourd’hui toute la mesure de la difficile situation que nous allons vivre…. Je me demande si je vais tenir le coup….. je suis encore très faible… 
 
Mais je ne montre rien à personne. Pas à Sylvain, pas à ma sœur…. C’est dur de lutter contre ses doutes toute seule… Sylvain a ses doutes à lui aussi, mais comme il a repris le travail, il va pouvoir se « changer les idées » et penser à autre chose. 
 
Je regrette cette césarienne qui me fait mal, mal physiquement, et mal psychologiquement….. 
 
Pour en revenir à Emile, il a une atrésie type 1 avec 2.5 cm entre les 2 culs de sacs.  Le lendemain de sa naissance il a été transféré en soin intensifs. Il pesait 2kg 950 à la naissance (ce qui est pas mal pour un bébé qui avait 4 semaines d’avance !). il a l’air serein et n’a pas l’air de souffrir. On attend 1 mois 1/2  dans un premier temps qu’il prenne du poids  et les médecins espèrent que les tissus vont continuer à pousser pour pouvoir faire un simple "raccordement " en tirant sur les tissus…. Après, l’inconnu.  
 
Coté présentation, Emile a un tuyau (le tuyau jaune) qui lui rentre directement dans l'estomac afin de l'alimenter. ça s'appelle une gastrotomie. Puis, il a une 'replog", c'est- à- dire qu'il a un "petit aspirateur" dans la bouche qui descend au fond de son cul de sac supérieur afin d'aspirer sa salive (qu'il produit comme vous et moi). Cette 'replog" est la cause de bien des malheurs tout au long de l'hospitalisation post-opératoire car elle est très désagréable et se bouche régulièrement. C'est la bête noire d' Emile. Enfin, les témoins cardiaques sur la poitrine. 
 
 
sur la photo suivante, on voit bien le problème de la "replog". Plus Emile s'énerve, plus il sécrète de salive, moins la "replog" est efficace et elle se bouche. La salive déborde de sa bouche... 

Pour le quotidien, il a fallu s'organiser. Nous avons un fils ainé:Félix, il  ne doit  pas pâtir de cette situation. Heureusement pour nous, ma soeur Marie Agnès habite à 20 minutes en voiture de la maison et Maya, une amie, aussi! 
 
Le lundi et le mardi ,Félix est chez ma soeur. Je peux donc arriver à l'hôpital vers 9h30. et repartir à l'arrivée de Sylvain vers 17h30. Sylvain fait la tranche 17h30-21h30 puis rentre à la maison, laissant Emile tout seul à l'hôpital. Le reste de la semaine, Maya vient garder Félix chez nous de 11h00 à 17h00. J'arrive donc à l'hôpital à 11h30 et en repars à 16h30 pour réceptionner Félix à la maison. Sylvain arrive lui à 17h30 pour ses 4 heures de "permanence" auprès d' Emile.  
 
La première question en arrivant à l'hôpital: c'est "quel est son poids ce matin?". c'est l'obsession: il ne sera pas opéré avant qu'il ait "profité"... puis "comment s'est passé la nuit?". C'est horrible d'arriver le matin et de voir votre enfant dans un autre pyjama que celui que vous lui avez mis la veille.... ça voulait dire pour moi qu'il avait vécu ... sans moi... et lui, il trouve encore la force de vous accueillir avec le sourire! Mais que se passe -t -il dans sa petite tête? comprend- t -il la situation? Pour lui, c'est normal que maman s'en aille le soir, c'est normal tout ce bruit infernal des alarmes des autres lits et du  sien, pour lui, c'est normal tout ce va-et-vient incessant des infirmières, des médecins, des grand -mères de l'association "main dans la main"... pour lui, c'est normal de ne pas manger par la bouche, c'est normal d'avoir ce tuyau dans la bouche qui aspire sa salive, c'est normal d'être piqué parfois plusieurs fois par jour.... c'est inimaginable que ce soit "normal" pour lui, ça me parait tellement inacceptable à moi! 
 
Il faut tenir maintenant chaque jour. C’est dur. L'ambiance de l'hôpital est bonne malgré tout, mais très fatigante. les infirmières sont bien dans l'ensemble. On sympathise et on a ses "préférées"… ou celles avec qui on s'engueule car le courant ne passe pas.  
 
On se divertit avec un livre, une revue (pour Sylvain car moi, j'ai tjrs été, en 5 mois d'hôpital, incapable de me concentrer sur un bouquin!). On se change les idées avec les allers et venues des visiteurs et des infirmières. on fait connaissance avec les parents du bébé voisin... on va boire un café à la cafétéria de l'hôpital pendant la sieste... mais on reste toujours là.. enfermés  à l'hôpital… attachés à un tuyau d'aspiration sans lequel la vie d'Emile serait un enfer. 50 cm de liberté... de quoi emmener Emile sur sa table à langer derrière son lit et de quoi le prendre dans ses bras en rapprochant le fauteuil du lit.  
 
Il y a des jours où tout se passe vite... ou on arrive à rigoler avec les visites des grand- mères de l'association "main dans la main", et à plaisanter avec les infirmières. Il y a des jours ou on arrive à positiver et à remonter le moral d'autres mamans dans le service, des jours où Emile a une super pêche et fait de grands sourires, ou des jours où il dort sereinement comme un bienheureux.  
 
Puis, il y a des jours horribles où chaque minute est une inquiétude, où Emile pleure à longueur de temps, où je le sens inconfortable, épuisé, douloureux... des jours où on doit se battre pour que les infirmières fassent monter le médecin de garde, des jours ou il faut se battre pour que les infirmières vous "entendent" dire "je pense qu'il a mal" , la douleur est insupportable à envisager. Il y a des jours où on n'a pas du tout envie qu'on touche à votre bébé, des jours d'isolement total où on a envie de tout oublier, de se recroqueviller sur soi- même avec son bébé sur le ventre pour tout oublier...  des jours interminables....qui recommenceront inexorablement le lendemain puisque c'est ça, votre quotidien. 
 
Je souhaite tout de même donner un énorme coup de chapeau aux grandmères de l'association "main dans la main" qui passent tous les jours de la semaine et du week- end auprès des enfants hospitalisés et leurs parents. Auprès d'elles, j'ai trouvé du réconfort, de la discussion, du soutien, de la présence auprès d'Emile pour me permettre d'aller boire un café...  mes journées étaient rythmées par leur défilé, par l'histoire de leurs vies (enfin entendre parler de autre chose que d'hôpital!), par leurs sourires.... MERCI! 
 

 
Emile à 4 semaines de vie:
il dort en "Pro-Clive",
 c'est à dire matelas surrélevé.